Vivian Maier - Self portraits
Prolongation de l'exposition - Les Douches Galerie jusqu'au 27 février !
Vivian Maier, une photographe de génie, une Américaine d’origine française, arpenteuse inlassable des rues de New-York et de Chicago. Elle fait partie de ces personnes touchées par le voile de l’invisibilité. Femme « banale », pauvre, d’une famille déchirée, nourrice vivant dans une chambre de bonne. Parfois la vie n’offre pas d’autre alternative que de s’accrocher ferme, ou de tout lâcher alors elle a choisit la fuite, elle choisit de porter son regard au-dehors et non en elle. Personne ne lui volera sa liberté, elle a l’énergie de ceux qui n’attendent rien, qui n’ont rien reçu en héritage. De la vie, elle sait déjà tous les drames. Elle est libre, tragiquement libre. À elle d’en faire son histoire, avec de pauvres atouts. La carapace qu’elle s’est forgée est son seul rempart contre tout ce qui menace. Misère. Solitude. Egarement. La grande Amérique n’a pas de pitié pour ses pauvres. Un talent anonyme. C’est ce qu’elle est. Elle ne montre ses photographies à personne, ne cherche aucune reconnaissance. C’est une photographe, une autodidacte, remplie d’une humanité rare. Alors pourquoi ne pas avoir montré son travail, à quiconque ? Pourtant il y a de la fierté chez Vivian Maier, une grande fierté. Celle des vaincus.
Chez elle, tout tourne autour de l'effacement, de l'effondrement, alors que chacune de ses photos, puisqu'elle est photographe, est un geste pour aimer, pour dire l'abondance de la vie, dans un irrésistible appel à célébrer la force de l'instant.
En 2007, John Maloof, un jeune homme d’affaires de vingt-cinq ans à l’allure étudiante, découvre dans une salle de vente de Chicago un lot contenant des milliers de négatifs, ainsi que des pellicules non développées et quelques tirages. Ses recherches lui permirent de découvrir que ce lot n’était qu’une partie d’un corpus qu’il rassembla en rachetant les nombreuses boîtes de négatifs, pellicules et documents. Ses recherches sur internet restent infructueuses jusqu’en 2009, lorsqu’un avis de décès est publié dans le Chicago Tribune, indiquant que Vivian Maier est décédée quelques jours plus tôt, à l’âge de 83 ans. Seule piste de John Maloof : les auteurs du faire-part de décès rédigé par les frères Gensburg (enfants dont Maier s’est occupée durant ses années de travail en tant que nourrice), il décide de les contacter et de les rencontrer. Vivian est bien l’autrice de toutes ces photos, les trois frères se souviennent. Elle ne se séparait jamais de son appareil, elle photographiait comme elle respirait, comme si sa vie en dépendait. Une sorte de troisième oeil ou de bouclier. John Maloof tient une certitude : il a découvert un trésor. Il va inventer, révéler Vivian Maier, au sens photographique du terme.
Naissance et résurrection d’une artiste de génie. Naissance d’une énigme.
L'histoire d'une femme libre qui a choisit de vivre les yeux grands ouverts.
Les Douches la Galerie, présente en ce moment et jusqu’au 27 février une sélection d’auto-portraits de Vivian Maier. Réalisés entre les années 1953 et 1970, ils témoignent encore une fois de son oeil pour les réflexions, de son grand sens de la composition et plus largement, de la richesse de son oeuvre. Rendez-vous donc aux Douches Galerie 5 Rue Legouvé, 75010 Paris.
Ressources :
Cet article est complètement inspiré du livre de Gaëlle Josse, publié en 2019. Une autrice venue à l’écriture par la poésie qui publie son premier roman, « Les heures silencieuses » en 2011 aux éditions Autrement, suivi de « Nos vies désaccordées » en 2012 et de « Noces de neige » en 2013. Ces trois titres ont remporté plusieurs récompenses, dont le prix Alain-Fournier et le prix national de l’Audio lecture en 2013. Elle raconte magnifiquement bien la vie de Vivian Maier dans son quatrième roman « Une femme en contre-jour », un récit qui nous transporte dans une vie mystérieuse, une vie à part mais riche d’un espoir toujours présent et d’une humanité constante. C’est dans ce livre que j’ai découvert pour la première fois Maier. L’écriture de Gaëlle Josse est douce, pleine d’interrogation et d’admiration pour cette femme en contre jour, Vivian Maier.
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